mercredi 31 octobre 2007

Régime d’asile européen commun (fiche)

Voici une première fiche, sur le régime d'asile commun: est-ce le bon endroit pour la poster?
Louise

Priorité
: concrétiser d’ici 2010, un régime d’asile européen commun (programme de la Haye). La présidence française doit conduire à une procédure commune d’asile et à un statut uniforme pour les personnes bénéficiant de l’asile ou de la protection subsidiaire (éviter par exemple, les grande divergences concernant l’accès des demandeurs d’asile au marché du travail).

Objectifs
: -offrir aux demandeurs d’asile et aux réfugiés des conditions aussi proches que possibles dans les différents pays de l’Union en les alignant vers le haut
-éviter les mouvements secondaires à l’intérieur de l’UE entre pays plus ou moins attractifs (« asylum shopping)
-éviter les demandes d’asile en cascade (grâce au « sytème de Dublin » déterminant un et un seul pays responsable de l’examen de la demande d’asile, et au fichier Eurodac mis en place en janvier 2003, répertoriant les empreintes digitales de chaque demandeur d’asile)

Base juridique
: depuis 2005, relève du champs communautaire, donc codécision
- Réglement Eurodac 407/2002 du 28 février
- Réglements « Dublin » 343/2003 du 18 février 2003 et 1560/2003 du 2 Septembre 2003 qui détermine le pays responsable de l’examen d’une demande d’asile
- Directive 2005/85/ce du conseil sur les procédures d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres (contestée par PE devant cjce car adoptée par le conseil sans tenir compte des amendements du PE notamment sur la liste des « pays sûrs »)
-Livre vert de la commission sur le futur régime d’asile commun, 6 juin 2007


Acteurs européens :
-la commission, DG Justice, Liberté, et Sécurité, unité « asile, immigration et frontières » :
- mène actuellement des consultations dans le cadre du Livre vert
-prépare un « portail commun » (un site internet surlequel les Etats membres pourront avoir des informations sur les pays d’origine dans le but d’harmoniser leur décision en matière d’asile)
-prépare une liste des « pays sûrs » dont les ressortissants ne pourraient pas prétendre
au statut de demandeurs d’asile sur l’ensemble du territoire de l’Union.
Franco Frattini, commissaire « Justice, liberté et sécurité ».
Stephano Bertozzi, membre de son cabinet, direction « asile, immigrations et fron tières » (tél : 02/292 12 20)
-le conseil : en discussion avec la commission et le PE sur la liste des « pays sûrs »
-le PE :
-Wolfang Kreissl-Dörfler (PSE, allemand), rapporteur en matière d’asile
-Javier Moreno Sanchez (PSE, Espagnol) auteur d’un rapport d’initiative sur l’immigration illégale

Acteurs français :
-Ziad Khoury, conseiller affaires intérieures (asile et immigration) à la RP française (secrétariat : Jacques de Granrut, Tél : 02 229 83 33 , jacques.de-granrut@diplomatie.gouv.fr)
-Lionel Rinuy, direction « Espace judiciaire européen » au SGAE (tél : 01 44 87 10 86)
-Brice Hortefeux, Ministre de l’immigration, de l’intégration et de l’identité nationale
-Thierry Mariani (UMP), vice-président de la délégation pour l’UE de l’Assemblée nationale, a fait une communication sur le Livre vert. En septembre 2007, il a présenté plusieurs amendements au projet de loi sur l'immigration (autorisation de recours aux tests ADN lors de la délivrance des visas de plus de trois mois au titre du regroupement familial, autorisation de statistiques raciales et ethniques, division par deux du délai de recours pour les demandes d'asile, interdiction d'hébergement d'urgence aux personnes en situation irrégulière.)

Société civile :
-Richard Williams, représentant européen du « European council on refugees and exiles »
- ...

Rétroplanning ou les priorités Com et PE

Tous les ans, fin février, la Commission adopte une communicaion sur sa stratégie pour l’année suivante. Vous trouverez ce document essentiel (stratégie 2008) ici:
http://europa.eu/eur-lex/lex/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2007:0065:FIN:FR:PDF
Ce texte est le point de départ de la fixation des priorités du Parlement:
a) il lance un processus de “dialogue structuré” des chacune de ses commissions avec la Commission européenne, qui s’étend de février à juillet.
b) depuis un an, ce dialogue structuré s’articule à une négociation à l’intérieur de chaque groupe politique (le PPE-DE est là dessus en avance sur les autres en termes d’organisation). Son but est de fixer les priorités de chaque parti pour l’année suivante, afin de pouvoir négocier, parti par parti (ce qui s’est produit en septembre), avec la Commission, avant que celle-ci ne produise le second document essentiel: son programme législatif et de travail.
2) Ce programme législatif, qui détaille les initiatives de la Commission et ses priorités pour 2008, a été adopté le 23 octobre.
Vous le trouverez ici:
http://europa.eu/eur-lex/lex/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2007:0640:FIN:EN:PDF
(il est malheureusement en anglais seulement pour l’instant)
Il est en cours d’examen dans les commissions et les groupes politiques, et fera l’objet d’un débat pour adoption lors de la prochaine session, le mardi 13 novembre au matin.

Le député allemand Hartmut Nassauer, vice président du PPE_DE est en charge du dossier.

vendredi 19 octobre 2007

La présidence française selon le gouvernement

Un fichier pdf qui résume les grandes lignes de la présidence

Entretien Jouyet (le 12/10)

Source : France 24

Q - Jean-Pierre Jouyet, nous sommes effectivement à quelques jours seulement du Sommet de Lisbonne. Allons-nous vers une bataille de tranchées, notamment avec les Polonais ou avec les Britanniques, ou êtes-vous confiant : on va vers un accord ?

R - Je suis raisonnablement confiant, optimiste. Vous ne pouvez jamais être sûr à 100 % du résultat d'un Conseil européen. Il y a eu un très bon travail dans la Conférence intergouvernementale. Tout le monde s'y est mis pour sortir de cette impasse institutionnelle, trouver de nouvelles institutions afin que l'on puisse se mettre au travail, au service de nouvelles politiques.

Q - Même les Polonais ?

R - Même les Polonais, qui ne sont pas dans une situation facile car ils ont des élections deux jours après le Conseil. Ils ont fait part d'un certain nombre de demandes, mais je crois que nous pouvons trouver des solutions. Ils ont également intérêt à montrer qu'ils sont pleinement dans cette Europe.

Q - Est-ce que, pour que les Polonais n'aient pas le sentiment de toujours reculer devant les exigences de Bruxelles, ça n'est pas finalement l'Europe qui recule toujours devant les Polonais ?

R - L'Europe se construit à 27. Les débats ont été difficiles au Conseil de juin dernier. Tout le monde y a mis du sien, y compris les Polonais. Jacques Delors le disait très souvent : il n'y a pas de gagnants et de perdants dans un conseil européen. Il faut trouver une solution collective. C'est un jeu collectif. Le Conseil européen le sera. Tout le monde fera certainement preuve de responsabilité pour que cela aboutisse à des résultats satisfaisants.

Q - Prenons un exemple sur ce jeu collectif : l'euro. Nous avons des Allemands qui sont pour l'euro fort, des Espagnols qui sont pour l'euro fort et des Français qui sont contre. Est-ce que l'Europe sera unie non pas seulement à Lisbonne mais encore plus rapidement à Washington, pour le G7. Y aura-t-il une position unie de l'Europe sur l'euro ?

R - Une position commune a été exprimée par les ministres de l'Economie et des Finances lors du dernier Eurogroupe. Cette position commune est tout à fait satisfaisante. Elle préconise, bien sûr, de faire attention à l'environnement économique international. Il y a un porte-parole de l'Eurogroupe et un président de l'Eurogroupe, M. Juncker, qui s'est exprimé. Je n'ai pas de commentaires à faire sur ce qu'a dit M. Juncker. L'Europe sera unie au G7 et sera unie sur le plan monétaire.

Q - M. Juncker a critiqué la France pour crier trop au loup. Avez-vous l'impression que l'on parle beaucoup trop d'euro fort en France plutôt que de faire une réforme économique nécessaire pour parer aux inconvénients de cet euro fort ?

R - Les réformes sont essentielles. Le problème français, c'est que nous n'avons pas fait les réformes que l'Espagne, par exemple, a courageusement faites. Nous avons un certain retard à rattraper de ce point de vue-là.

Q - Mais le problème, c'est la France, pas l'euro !

R - Laissez-moi terminer. Nous avons à faire un travail intérieur. Comme l'a dit Jean-Claude Juncker, il n'y a pas désaccord sur l'euro. Comme l'a souligné le président de l'Eurogroupe, il est également important de regarder la situation des autres monnaies. Nous demandons, et nous sommes tous d'accord là-dessus, plus de flexibilité du yuan. Nous constatons que la situation japonaise n'est pas une mauvaise situation sur le plan économique et que les marchés doivent la prendre en compte. Nous savons qu'il y a des déséquilibres dans l'économie américaine qui affectent les taux de change. Je n'ai pas d'autres commentaires à faire.

Il faut des réformes d'un côté, nous devons les faire et, comme vous le savez, nous les faisons. Je vous renvoie aux déclarations du président de la République et à ce qu'a indiqué Xavier Bertrand, ne serait-ce que sur les régimes sociaux. Ce ne sont jamais des réformes faciles. Il faudra écouter. Nous nous mettons au diapason, depuis cinq mois, de ce qui se fait dans le reste de l'Europe en termes de compétitivité.

Je le rappelle, une position commune a été prise par les ministres de l'Economie et des Finances. Pour la première fois, au plan européen, et c'est important, le président de l'Eurogroupe, le commissaire espagnol chargé des affaires économiques et monétaires, Joaquin Almunia, et le président de la Banque centrale européenne vont aller ensemble expliquer la problématique européenne vis-à-vis des marchés internationaux de capitaux et de change à Pékin. Je crois que c'est un signe fort de l'unité européenne sur ce thème. C'est la première fois que cela arrive. Nous souhaitons, en tant que Français, que cela puisse se faire dans les différentes enceintes.

Q - Il n'empêche que M. Juncker a encore dit aujourd'hui : "Je préfère un euro fort" et que l'on entend, tous les jours, le président français dire : "Je veux un euro moins fort."

R - Vous ne l'entendez pas tous les jours. Il dit qu'il y a un problème de sous-évaluation d'autres monnaies, notamment de monnaies asiatiques. Je suis comme Jean-Claude Juncker, j'ai vécu des situations différentes, j'ai vécu l'euro à 0,80, et je peux vous dire que ce n'était pas agréable non plus. On souhaitait, là aussi, que des corrections se fassent. C'est vrai que cela a toujours été une tradition de la politique française Nous n'aimons pas tout ce qui est volatilité sur l'ensemble des marchés des changes, ce qui ne correspond pas aux fondamentaux économiques. Je crois que cette préoccupation, et vous pourrez lire ce qui a été dit par les ministres de l'Eurogroupe la semaine dernière, a été partagée.

Q - Les coupables, ce sont les Américains et le dollar et les Chinois ?

R - Il ne faut pas raisonner en termes de coupables. On doit constater qu'aujourd'hui, il faut plus de flexibilité dans certains domaines, notamment des monnaies asiatiques, notamment du yuan. C'est une monnaie trop rigide et même trop administrée par rapport à d'autres monnaies. Compte tenu de la place qu'a pris la Chine dans l'ensemble des échanges internationaux, compte tenu de la place du yuan aujourd'hui, il est important que ceci soit corrigé.

Q - Jean-Pierre Jouyet, vous êtes l'un des symboles de l'ouverture, jusqu'à présent, pas de regrets, même à propos des tests ADN sur l'émigration ?

R - Mes fonctions sont d'abord européennes. Je considère que l'Europe n'est ni de droite ni de gauche. Nous devons travailler à la construction européenne. Pour le reste, comme je le dis, et vous l'avez montré, je garde mes convictions et mes amitiés.

Je me prononce le moment venu sur les problèmes de société. Sur les tests ADN, j'ai dit ce que j'avais à dire. Je ne pense pas que l'on s'y soit pris de la meilleure manière. Je pense qu'il est nécessaire, dans ce type de débats, d'avoir une consultation large, importante et qu'une évaluation soit faite. Je constate que tout cela a été précipité.

Q - Le gouvernement français a reproché aux Espagnols d'avoir fait dans leur coin des régularisations.

R - Nous avons des contacts très étroits avec nos amis espagnols. Le président de la République a vu M. Zapatero. M. Fillon a également vu M. Zapatero. M. Hortefeux a également vu son homologue. Nous sommes tous d'accord, maintenant, pour faire en sorte qu'il y ait, au plan européen, une approche commune en termes de politique migratoire. L'Europe, de toute façon, sera confrontée à des pressions démographiques extrêmement fortes. Nous le savons. Il faut essayer d'avoir des principes communs équilibrés, de faciliter l'intégration...

Q - Justement, sur un point comme celui-ci, qui est extrêmement important, l'immigration. Pourquoi chacun fait dans son sens, et pourquoi ne pas jouer collectif et avoir un débat européen sur les tests ADN ? Vous, les Espagnols, vous dites que cela ne pose pas trop de problème. En France, il y a une vraie polémique. Pourquoi ne pas agir ensemble ?

R - Je crois qu'il faut distinguer deux éléments, selon que l'on se prononce en tant que responsable des affaires européennes ou en tant que citoyen. Le premier, c'est que la France a sa tradition et différents pays européens n'ont pas tous la même tradition. La France, dans ce domaine, a la tradition du droit du sol. Il faut le savoir et avoir une réflexion éthique. La question des tests, dans un pays qui a une tradition de droit du sol, doit être évaluée. Le responsable que je suis dit à l'ensemble de ses amis, et à ceux qui ont critiqué le texte, de voir ce qui passe au niveau européen et dans l'espace Schengen. Tout cela devrait être repris et envisagé de manière plus large.

Q - Etes-vous totalement certains que l'on va arriver à un accord à Lisbonne ou qu'il peut y avoir des difficultés de dernière minute, avec les Britanniques par exemple ?

R - Nous ne pouvons plus attendre. Chacun le sait. Je pense que nous aurons cet accord. Concernant les Britanniques, ce n'est pas la première fois qu'ils se mettent en dehors d'un certain nombre de politiques. Nous avons déjà des cercles de solidarité plus ou moins forts dans l'Union européenne. Plus nous sommes nombreux, plus c'est normal. Rien n'est anormal.

Vous nous avez interrogés sur la politique d'immigration et de la coopération, et ce sera un des points de la présidence française. Nous devons converger sur la politique d'immigration et avoir des principes communs.

Q - Certains pays ne font-ils pas leur Europe à la carte. Ce que vous appelez jouer à 27, c'est vraiment à 27 ?

R - Nous jouons à 27. Qu'il y ait certains éléments à la carte, c'est une chose. Ce que nous souhaitons avec d'autres partenaires, c'est que ce que nous mettons en place et ce sur quoi certains veulent aller plus vite, puisse se développer de manière efficace, notamment en matière de politique d'immigration, de coopération judiciaire et policière. Tout ce que nous avons sur la table actuellement nous permet de penser que nous aurons un système efficace.

Q - Pas de risque d'une Europe à deux vitesses ?

R - Vous en avez déjà une Europe à deux vitesses, avec Schengen ou la zone euro. Certains sont membres de la zone euro, d'autres pas. Cela me paraît être un faux débat.

Q - Si tout se passe bien finalement la semaine prochaine à Lisbonne, les Britanniques pourront-il se passer d'un référendum, qu'ils perdraient éventuellement ? Est-ce que les Irlandais ne risquent pas de jouer les trouble-fête ? Il y a encore l'étape de la ratification.

R - Nous souhaitons ratifier le plus rapidement possible. Il serait symbolique que le pays qui a voté non et celui qui a voté oui, l'Espagne, puissent ratifier rapidement. Cela aurait une portée symbolique très forte. Nous avons déjà oeuvré ensemble, le pays du oui et le pays du non, pour que le Conseil européen du mois de juin soit le plus utile possible. Nous avons fait oeuvre utile avec Alberto Navarro, nous avions déposé un mémorandum. Je ne me m'attends pas à de grandes difficultés dans les différents pays. L'Irlande a choisi le référendum. Au moins 23 pays sur 27 vont le ratifier par voie parlementaire, dont le Royaume-Uni.

Q - Il y a tout de même des réactions en Europe à propos de cette ratification par les parlements, notamment en France, où on se souvient tous du non. Ecoutez cette réaction d'un député britannique, Nigel Farage, du parti Indépendance et Démocratie : "J'étais à Paris par cette soirée pluvieuse de 2005, quand les Français votèrent non à la Constitution européenne, et quelques jours plus tard, les Néerlandais enfoncèrent le clou. Comment le gouvernement français pourrait-il faire revenir un traité qui est à 96 % identique à l'ancien texte de la Constitution, tout en refusant d'organiser un référendum, sans que cela soit une marque de mépris à l'égard de ses citoyens et ne les incite à ne plus jamais aller voter ? La seule option honnête pour le gouvernement français serait assurément de donner aux citoyens une voix au chapitre".

R - Il y a eu une campagne présidentielle, en France. Nicolas Sarkozy a été clair. Il a dit devant tous les Français qu'il était pour un traité simplifié et que ce dernier serait soumis à ratification par voie parlementaire. Les Français ont voté à 53 % pour Nicolas Sarkozy. Il n'y a aucun déni de démocratie. Je crois également à la démocratie représentative. Cela ne signifie pas qu'il ne convient pas d'avoir de débat citoyen sur ce traité. Cela ne signifie pas que nous ne devons pas donner, en France, en Espagne toutes les explications sur ce traité, et faire en sorte que ces citoyens puissent être impliqués dans ce processus. Pour nos partenaires, cela a été un élément très important pour rebâtir ce nouveau traité.

Q - Vous souhaitez que, l'année prochaine, en 2008, quand la France prendra la présidence de l'Europe, tout cela soit réglé ?

R - Bien sûr, mais nous n'aurons pas toutes les ratifications. D'autres pays ont des échéances électorales. Les rythmes sont différents. Nous souhaitons, si possible qu'avant la fin de l'année 2008, début 2009, le processus de ratification soit terminé. Nous avons de bonnes chances de penser qu'il en sera ainsi.

Q - Sur cette Présidence européenne, quel est l'enjeu pour la France et quelles vont être les priorités ? On a vu que la France était de retour en Europe, sous l'impulsion du président de la République, tout le monde est d'accord, même ceux chez qui cela provoque quelques agacements, notamment en Allemagne. Quel est l'enjeu pour la France et qu'allez vous faire pour que l'Europe soit plus présente en France ?

R - D'abord, je crois que chacun en Europe se félicite de ce que la France soit plus présente dans les débats européens et essaie d'agir de manière constructive et collective. Telle est bien notre intention. Nous voulons une Présidence française, à partir du 1er juillet prochain, qui soit collective, européenne et citoyenne. C'est-à-dire, et c'est là que je reviens sur ce que je disais tout à l'heure, que les citoyens soient bien impliqués dans la préparation.

Q - Comment ?

R - Par des forums régionaux, décentralisés, et j'espère qu'Alberto Navarro voudra bien participer à certaines de ces réunions pour expliquer justement ce qu'est l'Europe, ce qui est en jeu, ce que permet le nouveau traité, comment va fonctionner une Europe plus démocratique et aussi plus sociale. Il y aura une charte dans le cadre de ce nouveau traité, qui respectera la spécificité de chacun des pays membres. Nous avons deux priorités, les deux grandes priorités sont le changement climatique et l'énergie. Ce sont deux problèmes très importants. L'Europe doit être exemplaire dans ces deux domaines. C'est un élément de souveraineté, d'indépendance pour l'Europe. Nous avons, d'autre part, toutes les questions qui touchent à l'immigration, l'intégration, la coopération policière ainsi que les questions de défense.

Q - Nicolas Sarkozy revient de Russie… Energétiquement, nous sommes intéressés mais, sur les aspects des Droits de l'Homme, sommes-nous assez musclés et suffisamment clairs ?

R - Je crois que Nicolas Sarkozy a été très clair à Moscou. Il a fait les rencontres qu'il fallait pour marquer nos préoccupations relatives aux Droits de l'Homme. Pour le reste, nous devons avoir avec la Russie un partenariat, car c'est un grand partenaire de l'Union européenne. Ce partenariat doit être tout à fait clair, nous disons ce que nous avons à dire, que cela plaise ou pas. Nous avons aussi un certain nombre de dossiers internationaux que nous devons également régler avec nos partenaires russes.

Q - Tout le monde a bien noté l'inflexion de Nicolas Sarkozy sur la Turquie. Il n'est plus opposé à ce que l'Europe poursuive les négociations. Sur ce point, il y a un problème crucial en France : doit-on ou pas avoir un référendum avant d'accepter qu'il y ait un nouveau pays membre de l'Union ? Je vous propose d'écouter à ce propos une question du député français, Jacques Toubon : "Monsieur le Ministre, vous avez récemment proposé que dans la révision de la Constitution qui est en voie de préparation, l'on supprime la disposition votée récemment qui prévoit que pour toutes les nouvelles adhésions de nouveaux Etats membres dans l'Union européenne, le président de la République soit obligé de recourir à un référendum auprès de l'ensemble des citoyens français. Vous savez bien que cette question concerne bien sûr en premier chef l'adhésion de la Turquie, que beaucoup de nos concitoyens demeurent opposés à cette adhésion. Pensez-vous que le fait de leur faire donner le sentiment que nous ne voulons pas les consulter dans cette question tellement importante pour l'identité européenne. Pensez-vous que leur donner ce sentiment, c'est faire avancer la cause de l'Europe et même plus largement faire avancer la cause des négociations avec la Turquie ? Pour ma part, je crois que la Constitution devrait demeurer telle qu'elle est."

R - Pour répondre à Jacques Toubon, ce que j'ai dit est parfaitement clair. Dans la Constitution, le président de la République devrait avoir le choix entre la procédure référendaire et la procédure de ratification parlementaire. Je ne me suis pas prononcé sur tel ou tel pays. J'ai dit qu'il ne me semblait pas bon pour la crédibilité de la France, pour le jeu collectif dont nous avons parlé, pour la sécurité des négociations, que nous ayons les mains liées. Je n'ai dit rien de plus, rien de moins. Je l'ai dit à titre personnel. Je le maintiens. Je pense que cela serait plus aisé. On ne va pas faire des référendums tous les six mois, si la Suisse, la Norvège, la Macédoine étaient appelées à entrer à peu d'intervalle dans l'Union européenne. Le cas peut se poser de manière théorique.

Q - Est-ce que vous pensez que le président de la République va vous suivre sur cet avis que vous avez rendu, c'est-à-dire qu'il n'est pas nécessaire d'avoir un référendum à chaque fois ?

R - Tout d'abord, on n'est pas obligé d'être d'accord sur tout et il est sain, dans une Europe qui fonctionne bien, qu'il y ait des débats comme nous en avons maintenant. Nous devons voir ce que sera l'Europe dans 15 ou 20 ans et comment elle évolue. C'est pourquoi nous avons proposé la constitution d'un groupe de sages pour voir quelles seront les valeurs européennes, le nouveau rêve européen et voir comment nous allons pouvoir nous organiser. Pour le reste, j'ai fait une proposition qui ne s'appliquait d'ailleurs pas à la Turquie mais de manière...

Q - Vous avez une chance d'être suivi ?

R - Il appartiendra au président de la République de le décider. Quand on fait des propositions, on souhaite toujours qu'elles soient suivies. On verra déjà si elle est suivie par le comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions devant lequel je me suis prononcé.

Q - Dernière question, sur l'Iran, y a-t-il un accord possible, en Europe, pour des sanctions plus fortes ?

R - L'Europe doit être unie sur ce point. Je crois qu'elle le sera. Nous en parlerons à Luxembourg, au Conseil Affaires générales./.

Les nouveaux hommes forts de la diplomatie de Sarkozy

Source : Le Figaro.fr

Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état aux Affaires européennes
 
Le «monsieur Europe» du gouvernement, c'est lui. Jean-Pierre Jouyet, 53 ans, connaît les usages et les jeux de pouvoir des institutions bruxelloises mieux que quiconque. Ajoutez à cela ses compétences en matière économique et son parcours de gauche et vous le rangerez parmi les trophées les plus précieux de l'ouverture pratiquée par Nicolas Sarkozy. Cet inspecteur des finances, ami intime du couple Hollande-Royal depuis l'ENA, a travaillé aux côtés de Jacques Delors quand celui-ci présidait la Commission européenne et il a été directeur adjoint du cabinet Jospin à Matignon.
Cofondateur des Gracques, ce groupe de hauts fonctionnaires issus de la gauche mais désespérés par son incapacité à se moderniser, Jean-Pierre Jouyet a décidé de saisir la main tendue par le chef de l'Etat en mai dernier. Il connaissait Nicolas Sarkozy pour l'avoir côtoyé à Bercy et croit en sa capacité de réformer le pays. Dans le nouveau dispositif diplomatique, cet ancien directeur du Trésor a la délicate tâche de gérer les relations avec nos partenaires de l'Union européenne, actuellement tendues à cause des déficits publics français. Il doit également préparer la prochaine présidence française de l'Union au second semestre 2008. Une étape déterminante pour Nicolas Sarkozy qui revendique le leadership européen pour la France, comme il l'a affirmé au New York Times avant son départ pour l'Assemblée générale des Nations unies. L'Elysée compte sur Jean-Pierre Jouyet pour convaincre Bruxelles de ses intentions de relance de l'UE.
 
Jean-David Levitte, conseiller diplomatique du Président
 
Est-il l'oeil du Quai d'Orsay à l'Elysée, ou celui du «Château» aux Affaires étrangères ? Cette éternelle question de la Ve République va perdre son sens avec Jean-David Levitte, 61 ans, qui dirigera, quand ses contours seront définis, le Conseil national de sécurité (CNS) dont Nicolas Sarkozy avait annoncé la création pendant la campagne électorale. Cet organisme inspiré de ce qui existe aux Etats-Unis ne disposera pas cependant du rayon d'action du National Security Council de la Maison-Blanche. La nouvelle structure devrait permettre au chef de l'Etat de gérer son «domaine réservé», qui englobe à la fois les questions diplomatiques et de sécurité extérieure. Ce qui donnerait ipso facto à Jean-David Levitte des compétences en matière de défense et de renseignement. Pour l'heure, le champ d'action du CNS est encore en discussion. On s'acheminerait plutôt vers une instance consultative à la disposition du président de la République. Mais en mettant à sa tête un ancien ambassadeur à Washington et au Conseil de sécurité, qui a déjà été le conseiller de Jacques Chirac à l'Elysée, Nicolas Sarkozy a choisi un homme de poids et d'expérience.
 
Philippe Etienne, directeur de cabinet de Bernard Kouchner
 
C'est l'éclectisme qui caractérise ce diplomate de-venu le bras droit de Bernard Kouchner en mai dernier. Philippe Etienne, 51 ans, a touché à nombre de domaines des Affaires étrangères. Quand on lui a demandé de diriger le cabinet du nouveau ministre, il était à la tête de la Coopération internationale et du Développement depuis un peu plus de deux ans. A ce poste, il mettait en oeuvre non seulement un important volet de la nouvelle politique africaine de Paris, mais aussi des aspects cruciaux de celle de l'immigration (étudiants dans les universités françaises, formations...). Juste avant cette direction générale, il avait été ambassadeur de France à Bucarest, à l'orée de l'adhésion de la Roumanie à l'Union européenne. Un choix naturel, puisque Philippe Etienne parle le roumain - ce polyglotte maîtrise également l'anglais, l'allemand, l'espagnol, le russe et le serbo-croate - et a fait deux passages à la représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne. Il fut également conseiller de Bernard Bosson quand celui-ci détint le portefeuille des Affaires européennes (1985-1987), puis directeur adjoint du cabinet de Hervé de Charette quand ce dernier dirigea le Quai d'Orsay (1995-1997). Les postes de Belgrade, Bonn et Moscou l'ont également compté parmi leurs meilleurs éléments.
Affable, discret, méthodique, Philippe Etienne avait commencé son parcours académique par les mathématiques. Au plus haut niveau : Ecole normale supérieure et agrégation. Sciences économiques, Langues orientales et l'ENA ont complété le cursus. Membre de la fameuse promotion Voltaire (Ségolène Royal, François Hollande, Dominique de Villepin, Renaud Donnedieu de Vabres, Jean-Pierre Jouyet, Michel Sapin...), il a opté pour la diplomatie. Un de ses camarades de promo, Jean-Maurice Ripert, aujourd'hui représentant permanent de la France au Conseil de sécurité de l'ONU, ancien du cabinet Jospin à Matignon et proche de Bernard Kouchner, l'a recommandé au «French doctor». Pour ce ministre symbolisant l'ouverture, ce choix présentait tous les avantages.
 
Gérard Errera, futur secrétaire général du Quai d'Orsay
 
«Un de nos grands ambassadeurs», dit-on dans l'entourage de Bernard Kouchner. Gérard Errera, 63 ans, est effectivement une des «pointures» du ministère des Affaires étrangères. Actuellement ambassadeur de France à Londres, il devrait, dans quelques semaines, retrouver le Quai d'Orsay pour y occuper le poste de secrétaire général, c'est-à-dire celui du plus haut fonctionnaire du ministère. Il y remplacera Philippe Faure, un ami de Dominique de Villepin, qui devrait, lui, s'installer à l'ambassade de Tokyo.
Sa carrière est marquée à la fois par le monde anglophone et par les affaires politiques et stratégiques. Il est passé par Washington, San Francisco et, comme on l'a vu, Londres. Il a également dirigé les relations internationales du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), tout en représentant la France à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). On le retrouve à Genève siégeant à la conférence du désarmement, avant de le retrouver à l'Otan comme représentant permanent de la France. Quand il regagne l'administration centrale, c'est pour y occuper le poste de directeur des Affaires politiques et de Sécurité. Autant dire qu'à l'heure d'un rapprochement atlantique souhaité par l'Elysée ainsi qu'à celle des dangers de la prolifération nucléaire, Gérard Errera pourra donner la pleine mesure de son curriculum vitae diplomatique.
 
Jean-Claude Cousseran, émissaire spécial au Moyen-Orient
 
Cela s'appelle une résurrection. Jean-Claude Cousseran, 63 ans, était une des bêtes noires de Jacques Chirac. L'ancien président de la République avait ostracisé cet expert du monde arabe nommé à la tête de la DGSE par Lionel Jospin parce qu'il lui reprochait d'avoir envoyé des agents enquêter sur des comptes bancaires qu'il aurait détenus au Japon. Avec l'avènement de Nicolas Sarkozy et de Bernard Kouchner, il vit un retour en grâce. Dès juillet dernier, le ministre des Affaires étrangères l'a envoyé au Liban et en Syrie pour tenter de réconcilier les factions rivales au pays du Cèdre. Et d'autres missions spéciales au Moyen-Orient devraient suivre. Il faut dire que les compétences de ce diplomate qui a travaillé dans les ambassades de Beyrouth, de Bagdad et de Téhéran (pendant la révolution islamique), avant d'intégrer les cabinets de Claude Cheysson puis de Roland Dumas, a fait ses preuves dans les dossiers les plus épineux. En 1985-1986, il avait notamment participé aux négociations pour libérer les otages français détenus par le Hezbollah libanais. En outre, Jean-Claude Cousseran a été ambassadeur à Damas et au Caire, deux capitales clés du monde arabe où il a noué nombre de contacts.
 
Alain Le Roy, ambassadeur chargé du projet d'Union de la Méditerranée
 
Pour le projet d'Union de la Méditerranée, cher à Nicolas Sarkozy, Bernard Kouchner a choisi un de ses proches. Alain Le Roy, 54 ans, a travaillé avec le nouveau chef de la diplomatie quand ce dernier représentait l'ONU au Kosovo : il était le préfet de la région ouest de la province. Il a ensuite représenté l'Union européenne en Macédoine, Etat limitrophe du Kosovo. Leur connivence remonte au drame de Sarajevo, quand Alain Le Roy, sous l'égide de l'ONU, dirigeait les opérations de réparation des services publics de la capitale bosniaque bombardée par les Serbes. Magistrat à la Cour des comptes, cet ingénieur des mines agrégé d'économie est passé par Total avant de faire un début de carrière dans la préfectorale qui l'amena au cabinet de Jean-Pierre Soisson, quand celui-ci détenait le portefeuille de l'Agriculture. Pour prendre en charge le projet d'Union de la Méditerranée - «trait d'union entre l'Europe et l'Afrique», selon les mots du chef de l'Etat -, ce «Kouchner boy» a dû recevoir l'onction du conseiller diplomatique du Président, Jean-David Levitte. Alain Le Roy était ambassadeur de France à Madagascar depuis novembre 2005. Il lui revient à présent de concrétiser ce que le candidat Sarkozy avait esquissé à plusieurs reprises pendant sa campagne : une sorte de «marché commun de la Méditerranée» selon le modèle établi par les Européens en 1957 quand les «Six» paraphèrent le traité de Rome.