vendredi 19 octobre 2007

Les nouveaux hommes forts de la diplomatie de Sarkozy

Source : Le Figaro.fr

Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état aux Affaires européennes
 
Le «monsieur Europe» du gouvernement, c'est lui. Jean-Pierre Jouyet, 53 ans, connaît les usages et les jeux de pouvoir des institutions bruxelloises mieux que quiconque. Ajoutez à cela ses compétences en matière économique et son parcours de gauche et vous le rangerez parmi les trophées les plus précieux de l'ouverture pratiquée par Nicolas Sarkozy. Cet inspecteur des finances, ami intime du couple Hollande-Royal depuis l'ENA, a travaillé aux côtés de Jacques Delors quand celui-ci présidait la Commission européenne et il a été directeur adjoint du cabinet Jospin à Matignon.
Cofondateur des Gracques, ce groupe de hauts fonctionnaires issus de la gauche mais désespérés par son incapacité à se moderniser, Jean-Pierre Jouyet a décidé de saisir la main tendue par le chef de l'Etat en mai dernier. Il connaissait Nicolas Sarkozy pour l'avoir côtoyé à Bercy et croit en sa capacité de réformer le pays. Dans le nouveau dispositif diplomatique, cet ancien directeur du Trésor a la délicate tâche de gérer les relations avec nos partenaires de l'Union européenne, actuellement tendues à cause des déficits publics français. Il doit également préparer la prochaine présidence française de l'Union au second semestre 2008. Une étape déterminante pour Nicolas Sarkozy qui revendique le leadership européen pour la France, comme il l'a affirmé au New York Times avant son départ pour l'Assemblée générale des Nations unies. L'Elysée compte sur Jean-Pierre Jouyet pour convaincre Bruxelles de ses intentions de relance de l'UE.
 
Jean-David Levitte, conseiller diplomatique du Président
 
Est-il l'oeil du Quai d'Orsay à l'Elysée, ou celui du «Château» aux Affaires étrangères ? Cette éternelle question de la Ve République va perdre son sens avec Jean-David Levitte, 61 ans, qui dirigera, quand ses contours seront définis, le Conseil national de sécurité (CNS) dont Nicolas Sarkozy avait annoncé la création pendant la campagne électorale. Cet organisme inspiré de ce qui existe aux Etats-Unis ne disposera pas cependant du rayon d'action du National Security Council de la Maison-Blanche. La nouvelle structure devrait permettre au chef de l'Etat de gérer son «domaine réservé», qui englobe à la fois les questions diplomatiques et de sécurité extérieure. Ce qui donnerait ipso facto à Jean-David Levitte des compétences en matière de défense et de renseignement. Pour l'heure, le champ d'action du CNS est encore en discussion. On s'acheminerait plutôt vers une instance consultative à la disposition du président de la République. Mais en mettant à sa tête un ancien ambassadeur à Washington et au Conseil de sécurité, qui a déjà été le conseiller de Jacques Chirac à l'Elysée, Nicolas Sarkozy a choisi un homme de poids et d'expérience.
 
Philippe Etienne, directeur de cabinet de Bernard Kouchner
 
C'est l'éclectisme qui caractérise ce diplomate de-venu le bras droit de Bernard Kouchner en mai dernier. Philippe Etienne, 51 ans, a touché à nombre de domaines des Affaires étrangères. Quand on lui a demandé de diriger le cabinet du nouveau ministre, il était à la tête de la Coopération internationale et du Développement depuis un peu plus de deux ans. A ce poste, il mettait en oeuvre non seulement un important volet de la nouvelle politique africaine de Paris, mais aussi des aspects cruciaux de celle de l'immigration (étudiants dans les universités françaises, formations...). Juste avant cette direction générale, il avait été ambassadeur de France à Bucarest, à l'orée de l'adhésion de la Roumanie à l'Union européenne. Un choix naturel, puisque Philippe Etienne parle le roumain - ce polyglotte maîtrise également l'anglais, l'allemand, l'espagnol, le russe et le serbo-croate - et a fait deux passages à la représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne. Il fut également conseiller de Bernard Bosson quand celui-ci détint le portefeuille des Affaires européennes (1985-1987), puis directeur adjoint du cabinet de Hervé de Charette quand ce dernier dirigea le Quai d'Orsay (1995-1997). Les postes de Belgrade, Bonn et Moscou l'ont également compté parmi leurs meilleurs éléments.
Affable, discret, méthodique, Philippe Etienne avait commencé son parcours académique par les mathématiques. Au plus haut niveau : Ecole normale supérieure et agrégation. Sciences économiques, Langues orientales et l'ENA ont complété le cursus. Membre de la fameuse promotion Voltaire (Ségolène Royal, François Hollande, Dominique de Villepin, Renaud Donnedieu de Vabres, Jean-Pierre Jouyet, Michel Sapin...), il a opté pour la diplomatie. Un de ses camarades de promo, Jean-Maurice Ripert, aujourd'hui représentant permanent de la France au Conseil de sécurité de l'ONU, ancien du cabinet Jospin à Matignon et proche de Bernard Kouchner, l'a recommandé au «French doctor». Pour ce ministre symbolisant l'ouverture, ce choix présentait tous les avantages.
 
Gérard Errera, futur secrétaire général du Quai d'Orsay
 
«Un de nos grands ambassadeurs», dit-on dans l'entourage de Bernard Kouchner. Gérard Errera, 63 ans, est effectivement une des «pointures» du ministère des Affaires étrangères. Actuellement ambassadeur de France à Londres, il devrait, dans quelques semaines, retrouver le Quai d'Orsay pour y occuper le poste de secrétaire général, c'est-à-dire celui du plus haut fonctionnaire du ministère. Il y remplacera Philippe Faure, un ami de Dominique de Villepin, qui devrait, lui, s'installer à l'ambassade de Tokyo.
Sa carrière est marquée à la fois par le monde anglophone et par les affaires politiques et stratégiques. Il est passé par Washington, San Francisco et, comme on l'a vu, Londres. Il a également dirigé les relations internationales du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), tout en représentant la France à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). On le retrouve à Genève siégeant à la conférence du désarmement, avant de le retrouver à l'Otan comme représentant permanent de la France. Quand il regagne l'administration centrale, c'est pour y occuper le poste de directeur des Affaires politiques et de Sécurité. Autant dire qu'à l'heure d'un rapprochement atlantique souhaité par l'Elysée ainsi qu'à celle des dangers de la prolifération nucléaire, Gérard Errera pourra donner la pleine mesure de son curriculum vitae diplomatique.
 
Jean-Claude Cousseran, émissaire spécial au Moyen-Orient
 
Cela s'appelle une résurrection. Jean-Claude Cousseran, 63 ans, était une des bêtes noires de Jacques Chirac. L'ancien président de la République avait ostracisé cet expert du monde arabe nommé à la tête de la DGSE par Lionel Jospin parce qu'il lui reprochait d'avoir envoyé des agents enquêter sur des comptes bancaires qu'il aurait détenus au Japon. Avec l'avènement de Nicolas Sarkozy et de Bernard Kouchner, il vit un retour en grâce. Dès juillet dernier, le ministre des Affaires étrangères l'a envoyé au Liban et en Syrie pour tenter de réconcilier les factions rivales au pays du Cèdre. Et d'autres missions spéciales au Moyen-Orient devraient suivre. Il faut dire que les compétences de ce diplomate qui a travaillé dans les ambassades de Beyrouth, de Bagdad et de Téhéran (pendant la révolution islamique), avant d'intégrer les cabinets de Claude Cheysson puis de Roland Dumas, a fait ses preuves dans les dossiers les plus épineux. En 1985-1986, il avait notamment participé aux négociations pour libérer les otages français détenus par le Hezbollah libanais. En outre, Jean-Claude Cousseran a été ambassadeur à Damas et au Caire, deux capitales clés du monde arabe où il a noué nombre de contacts.
 
Alain Le Roy, ambassadeur chargé du projet d'Union de la Méditerranée
 
Pour le projet d'Union de la Méditerranée, cher à Nicolas Sarkozy, Bernard Kouchner a choisi un de ses proches. Alain Le Roy, 54 ans, a travaillé avec le nouveau chef de la diplomatie quand ce dernier représentait l'ONU au Kosovo : il était le préfet de la région ouest de la province. Il a ensuite représenté l'Union européenne en Macédoine, Etat limitrophe du Kosovo. Leur connivence remonte au drame de Sarajevo, quand Alain Le Roy, sous l'égide de l'ONU, dirigeait les opérations de réparation des services publics de la capitale bosniaque bombardée par les Serbes. Magistrat à la Cour des comptes, cet ingénieur des mines agrégé d'économie est passé par Total avant de faire un début de carrière dans la préfectorale qui l'amena au cabinet de Jean-Pierre Soisson, quand celui-ci détenait le portefeuille de l'Agriculture. Pour prendre en charge le projet d'Union de la Méditerranée - «trait d'union entre l'Europe et l'Afrique», selon les mots du chef de l'Etat -, ce «Kouchner boy» a dû recevoir l'onction du conseiller diplomatique du Président, Jean-David Levitte. Alain Le Roy était ambassadeur de France à Madagascar depuis novembre 2005. Il lui revient à présent de concrétiser ce que le candidat Sarkozy avait esquissé à plusieurs reprises pendant sa campagne : une sorte de «marché commun de la Méditerranée» selon le modèle établi par les Européens en 1957 quand les «Six» paraphèrent le traité de Rome.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Good for people to know.