lundi 10 décembre 2007

ITW de Mariann Fischer-Boel commissaire à l'agriculture

Par Roman

Source : Le Monde du lundi 10 décembre 2007.

La commissaire européenne chargée de l'agriculture, Mariann Fischer-Boel, explique sa vision de l'avenir de la politique agricole commune (PAC). Elle revient également sur les positions adoptées par la France au cours des dernières semaines.

Que pensez-vous de la volonté de Nicolas Sarkozy de réformer la PAC ?


J'apprécie les signaux émis par la France. J'ai néanmoins entendu parler de dispositifs destinés à sécuriser le revenu des agriculteurs. Pour être honnête, cela ne fonctionnera jamais s'il s'agit de mettre en oeuvre des paiements destinés à apporter aux agriculteurs un complément de revenu lorsque leurs produits se vendent mal. C'est l'équivalent de l'approche américaine que tous les membres de l'Organisation mondiale du commerce ont rejetée.

Une telle garantie de revenu n'inciterait pas les agriculteurs à adapter leur production à la demande des consommateurs. La réforme de la PAC de 2003 fait une distinction entre les aides et la production, afin d'inciter les agriculteurs à changer de produits quand ils n'arrivent pas à les écouler.

M. Sarkozy plaide pour accroître la préférence communautaire. Qu'en pensez-vous ?

Cela dépend comment vous traduisez ce concept. Nous avons déjà la possibilité de maintenir et de soutenir l'activité de nos agriculteurs, dont les coûts de production sont plus élevés que dans d'autres parties du monde, afin qu'ils respectent différents objectifs : la prise en compte de l'environnement, la santé animale, la qualité et la sécurité des produits alimentaires.

La France entend lancer le débat sur la refonte de la PAC pendant sa présidence de l'Union. Or, la méthode choisie pour le bilan de santé, actuellement en cours, privilégie plutôt une série d'ajustements de la dernière réforme.

Pour la période 2008-2013, le bilan de santé offre une bonne base de discussions. Je suis sûr que nous trouverons une issue à cet exercice sous la présidence française. Même si le calendrier est serré avant les élections européennes de 2009. Car en vertu du nouveau traité de Lisbonne, l'agriculture deviendra ensuite un sujet de codécision avec le Parlement européen. Il pourrait être alors plus difficile d'obtenir un compromis rapide.

Que pensez-vous du cofinancement national des dépenses agricoles ?

Je ne suis pas en faveur d'une renationalisation de la PAC. Le résultat serait une sorte de course aux paiements sur les fonds nationaux. Il faudrait alors fixer un taux maximal de cofinancement, mais je ne pense pas que les ministres des finances souhaitent se voir dicter le niveau de leur engagement par l'Union européenne.

Comment se présentent les discussions sur le budget agricole pour après 2013 ?

Ce n'est pas encore le moment de discuter des conditions budgétaires, et du profil de la PAC après 2013. Nous aurons alors besoin d'une approche plus large, pas exclusivement concentrée sur l'agriculture, mais aussi sur le climat, l'énergie ou la recherche. Le budget agricole sera, il est vrai, sous pression. Mais la hausse des prix des céréales et des produits laitiers offre une base solide pour les discussions à venir, car elle peut permettre aux agriculteurs d'exister.

Cela dit, il ne s'agira pas de dire que nous pourrons vivre sans paiements directs. Je considère qu'il faudra défendre la politique agricole commune telle que réformée au fil des ans. Il faudrait se demander ce qui se passerait si on n'investit pas dans ce secteur. Nous verrions apparaître une agriculture beaucoup plus industrialisée.

Propos recueillis par Philippe Ricard

Aucun commentaire: