jeudi 15 novembre 2007

fiche unbundling

UNBUNDLING :

L’ownership unbundling, cela désigne la séparation de propriété des activités de production et de transmission de gaz et d’électricité ou, dit de façon différente : la séparation patrimoniale des réseaux de transport des autres activités (production, extraction, distribution et commercialisation) des opérateurs énergétiques. En un mot : dégroupage.


Le contexte :

Il existe déjà la directive 2003/55/CE du 26 juin 2003, concernant les règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel ; et la directive 2003/54/CE sur le marché intérieur de l’électricité.

- Le 10 janvier 2007, la Commission européenne a adopté une communication sur les perspectives du marché intérieur du gaz et de l’électricité visant une nouvelle politique énergétique pour l’Europe. L’objectif est triple : 1) lutter contre le réchauffement climatique. 2) renforcer la sécurité énergétique. 3) renforcer la compétitivité de l’Europe. Ce sont ces deux derniers points qui nous intéressent ici.
En particulier, l’objectif des mesures présentées par la Commission est de poser les bases d’une politique commune de l’énergie offrant un véritable choix aux utilisateurs européens, qu’il s’agisse de citoyens ou d’entreprises. Il s’agit aussi de briser les quasi-monopoles de géants tels que les Allemands E.ON et RWE ou les Français EDF et GDF.
« Aucun groupe fournisseur ou producteur d’énergie actif dans l’Union européenne ne peut posséder ou gérer un réseau de transport dans un Etat membre. »

- Le 10 juillet 2007, le Parlement européen a adopté le rapport du député Alejo Vidal-Quadras (PPE-DE) sur « les perspectives pour le marché intérieur de l’électricité et du gaz ».
Les députés européens se sont clairement prononcés en faveur de la séparation patrimoniale, même si le rapport reconnaît que ce modèle ne suffit pas à répondre à tous les enjeux auxquels le marché européen de l’énergie est confronté, notamment les interconnexions et la résorption des points de congestion entre marchés nationaux.

- Le 19 septembre 2007, la Commission européenne a adopté un troisième train de propositions législatives destinées à « garantir à tous les Européens une liberté de choix et des avantages réels et effectifs ».


Positions :
- Dans le camp des « pour », on trouve le Royaume-Uni et la Suède : des pays où la séparation de propriété existe déjà. L’Espagne et la Finlande ont ouvert leurs marchés depuis plus de trois ans.
- Dans le camps des « contre », les pays qui ont des opérateurs intégrés : Allemagne et France en tête, mais aussi Autriche, Grèce, Slovaquie, Chypre, Luxembourg (notamment Robert Goebbels, PSE), Lettonie, Bulgarie.


En France (éventuels contacts) :
- Le sénateur Bruno Sido (UMP), président de la mission commune d’information du Sénat sur la sécurité d’approvisionnement électrique de la France et les moyens de la préserver, s’étonne que la Commission « persiste à ne proposer qu’un alternative en matière de propriété et d’exploitation des réseaux, alors même que l’exemple français démontre qu’un troisième type d’organisation, fondé sur un contrôle et une régulation publique rigoureuse, garantit de manière satisfaisante l’indépendance des gestionnaires de réseau, le droit d’accès aux réseaux et la sécurité de l’approvisionnement électrique. »
- Nicole Fontaine (PPE) et Anne Laperouze (ALDE) contestent aussi l’efficacité de l’unbundling.
- Le PDG de GDF Jean-François Cirelli estime que la séparation patrimoniale représente une « stupidité » qui répond à une vision « idéologique » de Bruxelles. Il rappelle que depuis l’ouverture des marchés, « les tuyaux de GDF peuvent être utilisés par les concurrents, au même tarif que le propriétaire ». Il a fait part de sa « conviction profonde » qu’il n’y aurait « pas de unbundling dans le gaz », faute d’une majorité qualifiée pour imposer le schéma élaboré par la Commission.
- La ministre de l’Economie Christine Lagarde, à propos de l’unbundling : « Nous allons faire tout ce que nous pourrons pour nous opposer. »


Une solution alternative :
Devant l’opposition d’une majorité d’Etats membres emmenés par la France, la Commission a présenté une seconde option qui permettrait d’éviter cette solution radicale. La séparation pourrait alors se faire par la création d’un opérateur entièrement indépendant chargé de faire respecter les règles de concurrence par les ex-monopoles : c’est l’option Opérateur Indépendant du Système (ISO).
L’idée est que les actionnaires de l’entreprise de distribution énergétique encouragent davantage l’investissement dans les réseaux de distribution afin de stimuler l’entrée de nouveaux investisseurs sur le marché. Ce système permettrait de renforcer la compétitivité du secteur de l’énergie, actuellement étouffé par les entreprises intégrées existantes. Cette option permettrait notamment aux entreprises de rester propriétaires de leurs actifs, mais la gestion, y compris l’investissement et les décisions commerciales, devraient être transférées à un Opérateur indépendant du système. En retour, ce dernier verserait une rémunération.


La présidence française :
On l’a dit – et Christine Lagarde encore mieux que nous : la France est opposée à l’unbundling. Or les décisions au Conseil dans le domaine de l’énergie sont pour l’instant soumises à la règle de l’unanimité : à partir de 2009, ce sera à la majorité qualifiée. On peut donc supposer que la présidence française va tenter d’accélérer le processus de décision afin qu’un compromis soit trouvé avant 2009.


La sécurité énergétique :
L’unbundling n’a pas pour seule vocation de stimuler la compétitivité en Europe. Il s’agit également d’un instrument pour limiter les investissements étrangers, un instrument de négociation internationale, via une clause de réciprocité. En effet, le 19 septembre 2007, lors de ses déclarations sur la séparation patrimoniale des réseaux, la Commission a annoncé la mise en place d’une clause de réciprocité. Cette dernière vise à empêcher des investisseurs étrangers à l’UE - y compris les compagnies russes - d’acquérir des sociétés européennes de transport de gaz et d’électricité. Elle répond aux craintes que Gazprom ne puisse dominer ces réseaux de transport comme il le fait progressivement sur les gazoducs alimentant l’Europe. Par ailleurs, ces mesures d’unbundling, qui visent à faciliter l’accès au marché pour les nouveaux entrants, pourraient aider in fine Gazprom dans sa stratégie de domination des différents maillons - y compris le marché de détail - de la chaîne gazière.
Rappel : Gazprom est la plus importante compagnie verticalement intégrée du secteur du gaz naturel en terme de réserves (61% de la totalité des réserves russes de gaz naturel et environ 17% des réserves mondiales), de production (85% de la production intérieure, un cinquième de la production mondiale) et de transport (elle détient le plus grand réseau au monde de gazoducs haute pression). Elle est contrôlée par la Fédération de Russie qui y a augmenté sa participation en juin 2005 avec pour objectif de reprendre le contrôle des ressources naturelles nationales, qui sont le fondement de l’économie russe.


 2 angles :

1) La présidence souhaite-t-elle réellement accélérer la procédure sur ce dossier ? Si oui, vers quel compromis s’achemine-t-elle ? Avec quels pays-partenaires ? Consultation des opérateurs énergétiques et autres (le cabinet de conseil Capgemini a publié un rapport traitant notamment du sujet de l’unbundling) ? Bref c’est encore assez vague...
2) L’unbundling et Gazprom : certains disent que ça va favoriser l’entrée de Gazprom sur le marché en démantelant les grands groupes européens ; d’autres assurent que ça va justement préserver l’Europe du géant russe… A creuser donc, je ne comprends pas trop.

1 commentaire:

cuej-europe2008 a dit…

Article :

ITV d’un expert sur les questions de l’énergie : éventuellement Colette Lewiner, directrice internationale du secteur Energie chez Capgemini (le cabinet de conseil vient de publier le 9ème Observatoire des marchés de l’énergie, qui traite notamment de la question de l’unbundling).

Quelques questions à aborder :

- Où en est la libéralisation du marché de l’énergie dans les différents pays européens ? Et en quoi les différentes situations nationales expliquent l’opposition ou l’adhésion au projet d’unbundling ? Quelles sont les entreprises « menacées » ?

- La Commission veut accroître la compétitivité des marchés de l’électricité en imposant la séparation patrimoniale. Or, à quelques exceptions près, on observe des prix de détail de l’électricité supérieurs à la moyenne européenne dans les Etats membres dont les marchés sont ouverts à la concurrence depuis plus de trois ans.

- La proposition de directive établit le partage des réseaux existants, mais que fait-elle pour favoriser le développement massif des investissements en faveur de l’exploration-production et des infrastructures de réseaux, nécessaires à la sécurité d’approvisionnement de l’Union ?

- Quelle est la position de la France sur l’option « Opérateur indépendant du système », l’alternative à l’unbundling proposée par la Commission ?

- Quelle peut être la stratégie de la présidence française dans le traitement de ce dossier, sachant qu’à partir de 2009 c’est une question qui devra être votée à la majorité qualifiée ?

- etc.